DEVENIR AVOCAT AU MOYEN-ÂGE: NISI SIT JURATUS ET IN ROTULO NOMINUM ADVOCATORUM SCRIPTUS

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Publié le: 11-07-2025

DEVENIR AVOCAT AU MOYEN-ÂGE: NISI SIT JURATUS ET IN ROTULO NOMINUM ADVOCATORUM SCRIPTUS

L'ordonnance du 11 mars 1345 expose les qualités qu’il "ne fallait pas avoir" pour exercer la profession d’avocat. "Ne pas être" : tel était le principe fondamental pour plaider la cause de ses contemporains. Si le Décret de Gratien, fortement influencé par le Digeste, énumère ce qu’il convient "de ne pas être" (C. 3 q. 7 c. 2), un auteur a su, avec une simplicité presque naïve, énumérer ces critères : Jean Boutillier (1340-1395). Dans son ouvrage "Le grand coustumier et practique du droict civil et canon", ou plus communément appelé "La somme rural", le Seigneur de Froidmont écrit : "De ceux qui peuvent eftre advocats en cour, et quels non". Sous ce titre quelque peu trompeur, Boutillier procède par élimination et désigne de sa plume, ceux qui ne peuvent prétendre à la profession d’avocat : "les mineurs d’aage ; sourds, aveugles, femmes, furieux, sergents, infâmes, clercs, religieux, clercs de cour et notaires, juges et assesseurs". Bien que cette liste soit assez explicite, il est notable qu’elle exclut les clercs de la fonction d’avocat… Pourquoi donc ?

Pour répondre à cette question, il est utile de se tourner vers l’avocat et historien du droit Antoine-Gaspard Boucher d’Argis (1708-1791), auteur de "Règles pour former un avocat tirées des plus célèbres auteurs anciens et modernes". Dans un chapitre intitulé "Quelles personnes sont admises à faire la fonction d’avocat, et des formalités de la réception", il écrit : "Les défenses qui ont été faites aux Ecclésiastiques de se mêler des affaires séculières n’ont jamais été étendues aux fonctions de la Magistrature, ni à celle d’Avocat, et même, pendant plusieurs siècles, depuis l’institution du Parlement, le Barreau de Paris n’était presque rempli que d’Ecclésiastiques : Prêtres, Curés, Chanoines de Paris, Officiaux et Archidiacres. Comme, dans ces temps d’ignorance, ils étaient presque les seuls à posséder une certaine teinture des lettres, nombreux étaient ceux qui s’adonnaient parallèlement à la profession d’Avocat."

Bien que les hommes en soutane fussent exclus, ils n’en demeuraient pas moins indispensables, allant même jusqu’à léguer leur habit aux avocats d’aujourd’hui.

- J. Boutillier, La grand coutumier et pratique du droict civil et canon observé en France, composé par M. Jehan Bouteiller,… et cy-devant imprimé sous le nom de La Somme rural, Édition nouvelle, illustrée de commentaires par L. Charondas Le Caron, 1621, p. 673-674.
- P. Génois, La grande conférence des ordonnances et édits royaux, Paris, t. 1, 1678, p. 470.
- A-G. Boucher d’Argis, Règles pour former un avocat tirées des plus célèbres auteurs anciens et modernes, Nouvelle édition, Durand, Paris, 1778, p. 70-79.
- R. Delachenal, Histoire des avocats au parlement de Paris, 1300-1600, Paris, E. Plon, 1885, p. 2-33.

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